Xarchias, la Renaissance

Myrddin était un homme particulier. Né d’un ange, Mercatoris, et d’une guérisseuse, Aliénor, il était devenu l’Enfant-Esprit, le Passeur des Mondes, l'Ermite puis enfin le Dernier Fléau. Sa vie fut longue et mouvementée.

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Myrddin...

À l'âge de 18 ans, il apprit à maîtriser ses pouvoirs surnaturels dans son pays natal, Corinthe. Il communiquait avec les Esprits de la Nature : Sylvains, animaux, esprits des rivières et de la terre... En réalité, il n'était qu'un Merle de plus, un homme capable de commander aux Esprits, Fils de Malikki, la Déesse de la Nature.

Seulement, son hérédité peu ordinaire lui avait conféré un pouvoir supplémentaire, celui d'accéder à un monde d'esprits particulier, celui des anges et des morts. Il lui permit de repousser les ténèbres grandissantes de Corinthe, aidé en cela par bon nombre d'alliés et d'amis rencontrés sur les routes.

Il bâtit un royaume, le fit prospérer et le dirigea avec sagesse, droiture et équité. Il devint le conseiller des grandes figures de Corinthe et, le temps faisant, il parvint à en devenir une, autant respectée que crainte de tous.

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Guerres et alliances

Les années passèrent, les ténèbres avançaient ou reculaient, les guerres succédèrent aux guerres. L'expérience de Myrddin dans le domaine de la magie, aidée des pouvoirs de son ascendance paternelle, lui permit de perfectionner sa maitrise des forces de la nature. Se sentant vieillir, il légua son royaume et sa fortune à son meilleur disciple, un Semi-Orque nommé Uggdrasil, avant de se retirer dans les Havres Gris, ultime refuge des Forts et des Héros, car seuls les initiés peuvent s'y rendre : il faut savoir appeler la barque qui y mène, mais également savoir s'y rendre à pied, à travers un labyrinthe marécageux et semé d'embûches.

Au sortir de ce dédale, Myrddin découvrit les plus belles merveilles de toute sa longue vie. Anges et démons, elfes et nains, humains et gobelins semblaient vivre en harmonie.

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Les Havres Gris...

Là, Myrddin fut révélé à sa destinée. Telpalas, le Régent du Royaume des Anges, apparut devant lui pour la deuxième fois de toute sa longue vie. Il lui expliqua le but de son existence : récupérer Radiance, le Fléau des Anges, une épée légendaire qui peut faire le plus grand bien comme les plus grand mal, pour mettre fin au règne maléfique des Dragons sur le monde des vivants et aux guerres dévastatrices qui étaient en train de se préparer.

Myrddin réussit donc au prix de nombreux combats, d'alliances multiples et de rencontres fortuites ou durables, à retrouver Radiance. Mais ce qui suivit lui coûta presque la vie, bouleversant ainsi son corps et son esprit.

Myrddin le Sage...

Il existe, reculé dans les profondeurs des terres du Volos, un sanctuaire légendaire appelé le Kimalik, oublié depuis des temps immémoriaux, peut-être depuis la Guerre de l'Éveil, qui sait. Ce sanctuaire avait été dissimulé par les Dieux Dragons eux-mêmes, Obéran et Cresso, afin de renfermer une relique de ces temps reculés, la plus importante de toutes, car c'est par elle qu'est venue la fin de la Guerre de l'Éveil et le début du partage des mondes entre le Bien et le Mal. Cette relique avait un nom : Radiance, le Fléau des Anges.

C'est dans le Kimalik que Myrddin, au prix d'efforts inimaginables, réussit à se rendre. Et il fut le premier depuis plus d'un millénaire à revoir l'instrument du conflit. C'était un ouvrage de perfection, tant en beauté qu'en efficacité, et Myrddin le ressentit aussitôt. Radiance avait une âme, il arrivait à l'entendre, comme il était arrivé à entendre les animaux ou les Sylvains. Mais le plus étonnant était qu'il croyait reconnaître cette voix : cristalline, pure et neutre comme la rosée du matin ; vive fougueuse et impétueuse comme la braise du feu de camp ; sinueuse, fraîche et libre comme la brise du soir ; enfin, profonde, impitoyable et sombre comme la nuit sans lune. Il ne pouvait le croire et, comme pour s'en assurer, il avança la main vers l'objet du Destin, de son destin.

Dès qu'il la saisit, il y eut comme une explosion dans son esprit. Elle fut si puissante qu'il en tomba à genoux. Une aura couleur lavande, la même que celle de ses yeux, baigna toute la pièce. Les paupières de Myrddin étaient fermées. Il comprenait plus ou moins ce qui lui arrivait : Radiance et lui étaient en train de ne faire plus qu'un, de lier leurs esprits à la fois dans l'épée et dans son corps.

Myrddin ouvrit les yeux. Leur couleur avait changé : l'un était devenu bleu azur, l'autre rouge sang. Le Bien d'un côté, le Mal de l'autre. Il était devenu le Dernier Fléau.

Mais c'est alors qu'apparut dans un tonnerre apocalyptique Obéran, l'un des Dragons Divins qui régissaient impitoyablement le monde des vivants.

— Tu t'es une fois de trop mêlé à une force qui dépasse de loin ton entendement, misérable petit mortel et tu vas payer pour cela ! hurla-t-il. Je vais t'anéantir et maudire tes proches jusqu'au dernier !

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La fureur du Dieu Dragon...

Obéran se rua alors sur Myrddin, la gueule grande ouverte. Mais une armée de fer et d'ailes fit brusquement irruption et se précipita sur le dragon. Il y avait à la tête de ce bataillon d'anges le Régent en personne. Pendant que son détachement principal s'occupait du monstre, Telpalas rejoignit Myrddin gravement blessé par un coup violent du dragon. Il perdait beaucoup de sang et sa vie ne tenait maintenant plus qu'à un fil. Le Régent s'aperçut que le vieil homme tenait toujours fermement Radiance, qui brillait d'un étrange éclat mêlé de bleu et de rouge. Il sourit. L'Unification avait fonctionné, c'est tout ce qui comptait à ses yeux. Il ne restait plus qu'à entamer la Cérémonie de Neutralisation. Il souleva alors Myrddin et se dirigea vers le passage entre ce monde et le sien, et par lequel son bataillon s'était introduit.

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Le secours inespéré de Telpalas...

Myrddin se réveilla dans une sorte de tente blanche, sur un matelas de paille et de chiffon. D'un coup tout lui était revenu en tête : le Kimalik, Obéran, Telpalas. Et le plus important, Radiance. Il la chercha du regard, mais ne la trouva pas. Il se sentait bizarre, sans elle, comme si on lui avait enlevé une partie de son esprit. Il essaya de se lever, et s'aperçut que sa blessure avait complètement disparu, comme si elle n'avait jamais existé. Outre son esprit, Il sentait que son corps avait également changé, comme rajeuni...

Mais, avant même que le Mage ne pût regarder son reflet dans la bassine d'eau située derrière lui, un ange armé d'une lance et d'un bouclier entra dans la tente et lui annonça sur un ton militaire :

— Son Altesse le Régent sacré Telpalas désire la visite du Merle Myrddin dès son réveil. Veuillez me suivre.

Ne sachant trop que faire, Myrddin obéit sans poser de question et suivit le soldat. Arrivé dans la salle principale du palais, Myrddin se trouva seul, debout face à un homme ailé dont le charisme et l'autorité qui émanaient de lui faisaient la toute puissance d'un Régent.

— Bienvenue parmi nous, Xarchias, on devrais-je dire ancien Myrddin, dit Telpalas.

— Xarchias ? Pourquoi m’appelez vous Xarchias et non plus Myrddin ?

— Parce que Myrddin est mort, Xarchias, et que tu es la matérialisation de son Esprit dans le monde des Anges.

Le jeune homme ouvrit des yeux ronds. Quelles inepties racontait le Régent ? Comment Myrddin pouvait-il être mort, alors qu’il se sentait bel et bien vivant et en bonne santé ? Et pourquoi le nom de Xarchias ? Telpalas devinait les questions que pouvait se poser le jeune homme.

— Tu n’as pas survécu à l’attaque d'Obéran, Myrddin Enfant-Esprit. Mais je t’ai ramené à temps pour que ton Esprit se matérialise ici. Tu es Xarchias à présent, un simple ange parmi les anges.

Le Régent claqua alors des doigts. Deux autres anges pénétrèrent dans la grande salle et se dirigèrent vers le Mage. Ils entreprirent de frictionner son dos, à l’aide d’un linge, comme s’il était mouillé. En réalité, et Myrddin – enfin, Xarchias – le remarqua bien vite, ils séchaient et déployaient des ailes encore gluantes d’un liquide translucide qu’il avait sur tout le dos.

Xarchias...

Quand les deux individus eurent fini leur travail, ils s’inclinèrent et se retirèrent. Telpalas reprit, comme pour répondre aux questionnements multiples de son interlocuteur.

— Ton esprit a subi ici comme une sorte de renaissance. Ton nouveau corps te parait jeune, car ton esprit l'est éternellement, et ce grâce à la condition de Mercatoris, ton père. Il est normal que tu possèdes des ailes et, comme le papillon, tu dois les sécher avant leur première utilisation. Tu es physiquement mort, Xarchias. Le Myrddin que tu étais n’est plus. Tu as donc perdu tes anciennes affinités avec les esprits. Du moins, tu ne peux plus les appeler à toi. Tu peux toujours les entendre et leur parler, car tu es un Esprit, mais tu n’es plus un Merle. Bienvenue donc parmi nous, Xarchias.

— Et qu’en est-il de Radiance ? demanda l'homme, inquiet.

— Elle est en lieu sûr. Personne ne doit y toucher, pas même toi, et ce sous peine de bannissement immédiat et définitif de ce monde vers le vil et cruel monde des Vivants, où la guerre gronde à nouveau. Radiance doit être neutralisée. Nous cherchons encore un moyen de la détruire et…

Mais Xarchias n’écoutait plus. Il s’était précipité, furieux, vers la sortie du Palais. D’instinct, il fit fonctionner ses ailes et put s’envoler à la recherche de l’autre moitié de son esprit. Il ressentait au tréfonds de son âme l’appel de Radiance. Il savait intimement que si le Fléau des Anges était détruit, il le serait aussi. Or cela, il n’en était pas question ! Il devait récupérer à tout prix Radiance, quitte à perdre sa place au Royaume des Anges.

Il se laissa guider par son instinct et, en quelques minutes, il se retrouva face à elle. Il était hors de lui. Il avait dû forcer nombre de passages et neutraliser plus d’un garde. Il s’empara de Radiance et fit mine de repartir. C’est alors que Telpalas apparut devant lui en pleine lumière et lui dit, furieux :

— Qu’as-tu fait, misérable ! Tu ne sais quelle puissance tu tiens entre tes mains. Tu as bravé l’Interdit, tu seras donc banni à jamais ! Puisses-tu mourir ici-bas ! Et, par la même occasion, je récupérerai Radiance !!!

La colère du Régent...

Une lueur de démence traversa le regard du Régent. Xarchias avait compris le danger et, malgré ses réticences, se prépara à se battre.
Telpalas commença alors à prononcer l’incantation qui devait le bannir et, d’une main ferme, préparait son offensive pour récupérer l’épée légendaire.
Xarchias n’hésita pas une seconde. Guidé par l’esprit de Radiance, il exécuta une attaque rotative tout en fondant sur Telpalas. Celui-ci n’eut pas le temps de se protéger. L’arme heurta de plein fouet le bras droit du Régent et le trancha net.

Mais l’incantation était finie et Xarchias fut aspiré dans un tourbillon et renvoyé dans le monde des Vivants, dans une contrée éloignée de sa terre d'origine du nom de Thessalie, le Fléau des Anges toujours au poing…

*À suivre...*

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